Les évolutions salariales en France restent un enjeu central pour les entreprises et les salariés, notamment dans un contexte d’amorce de crise économique et de tensions sur le pouvoir d'achat. Pour l'année 2025, plusieurs tendances se dessinent, tant sur le plan des augmentations collectives que sur celui des ajustements individuels. Les NAO s’annoncent tendues.

 

Analyse des évolutions de salaires prévues en 2025

Les prévisions pour 2025 indiquent une progression générale des salaires en France, oscillant entre 2,5 % et 4 % selon les secteurs et les catégories professionnelles. Cette augmentation, qui s’inscrit dans une baisse de l’inflation (1,5 % annoncée) laisse prévoir une légère amélioration du pouvoir d'achat pour les salariés.

Certains secteurs, comme la technologie, la santé et l'énergie, se distinguent par des hausses plus marquées, supérieures à 6 %, en raison de la compétition accrue pour attirer et fidéliser les talents. À l'inverse, les branches traditionnelles, telles que l'industrie manufacturière ou le commerce de détail, envisagent des augmentations plus modestes. Ces différences s'expliquent par la pression concurrentielle et les contraintes budgétaires qui pèsent différemment selon les secteurs.

Par ailleurs, les disparités entre les cadres et les non-cadres tendent à se réduire, bien que les premiers continuent de bénéficier d'une part plus importante des augmentations individuelles, souvent liées à la performance. Les entreprises s'orientent également vers des politiques salariales plus équitables, en intégrant des mécanismes de réévaluation pour les salariés aux plus faibles revenus.

Enfin, un autre levier important reste la revalorisation des minimas conventionnels dans de nombreuses branches professionnelles, qui doivent être ajustés pour rester conformes au relèvement régulier du SMIC. Ce facteur, couplé à la nécessité de maintenir l'attractivité des emplois, continuera à façonner les discussions salariales en 2025.

La crise économique qui s’annonce pourrait peser de façon importante sur ces prévisions d’augmentations.

 

NAO obligatoires dans certaines entreprises

La négociation annuelle obligatoire (NAO) sur les salaires concerne toutes les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d’organisations représentatives de salariés. Cette négociation est imposée par le Code du travail : Article L2242-1, modifié par Ordonnance n°2017-1385 du 22 septembre 2017 - art. 7 :

« Dans les entreprises où sont constituées une ou plusieurs sections syndicales d'organisations représentatives, l'employeur engage au moins une fois tous les quatre ans :

1° Une négociation sur la rémunération, notamment les salaires effectifs, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée dans l'entreprise ;

2° Une négociation sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, portant notamment sur les mesures visant à supprimer les écarts de rémunération, et la qualité de vie au travail ».

Un accord collectif peut fixer une périodicité différente. A défaut, cette négociation a lieu chaque année.

L’employeur qui ne prend pas l’initiative d’engager cette concertation s’expose à des sanctions financières et pénales. Il lui appartient donc de convoquer les organisations syndicales pour négocier.

Les thèmes suivants sont obligatoirement abordés lors des NAO :

Négociation obligatoire

Thèmes abordés

Rémunération, temps de travail, partage de la valeur ajoutée

Salaires bruts, primes, avantages en nature, etc.. à l’exclusion des décisions individuelles en matière de rémunération

Durée effective et organisation du temps de travail

Intéressement, participation et épargne salariale

Égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et qualité de vie au travail

Articulation entre la vie personnelle et vie professionnelle

Objectifs et mesures permettant d’atteindre l’égalité professionnelle

Possibilité de maintenir l’assiette des cotisations des salariés à temps partiel au niveau de ceux des salariés à temps plein pour l’assurance vieillesse

Mesures pour lutter contre la discrimination

Mesures concernant l’emploi des handicapés

Assurance frais santé

Exercice du droit d’expression directe et collective des salariés

Droit à la déconnexion

Prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels

Gestion des emplois et des parcours professionnels (entreprise d’au moins 300 salariés)

Mise en place d’un dispositif de gestion des emplois et des compétences (GPEC)

Mobilité professionnelle ou géographique interne

Grandes orientations à trois ans de la formation professionnelle

Recours aux différents contrats de travail, au temps partiel et aux stages

Déroulement de la carrière des salariés exerçant des responsabilités syndicales

 

 

Comment se déroulent les NAO ?

En général, plusieurs réunions sont nécessaires. Lors de la première, sont déterminés le calendrier des réunions et la liste des documents qui seront remis aux délégués syndicaux. Les délégués syndicaux peuvent également s’appuyer, pour négocier, sur les documents contenus dans la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE). Ils y trouveront de nombreuses informations utiles.

Rappel : les employeurs d'au moins 50 salariés doivent mettre à disposition du comité économique et social (CSE) et des représentants du personnel cette BDESE. Elle rassemble les informations sur les grandes orientations économiques, sociales et environnementales de l'entreprise.

La ou les réunions suivantes doivent permettre aux pourparlers d’avancer. Il est important à ce stade que les élus avancent des revendications crédibles et argumentées, c’est-à-dire en phase avec les réalités économiques et financières de l’entreprise. Un argumentaire construit et étayé sera plus difficilement contesté par l’employeur, sauf mauvaise foi... Trop souvent, les élus se présentent devant l’employeur sans éléments concrets !

Tant que dure la négociation, l’employeur ne peut prendre aucune décision unilatérale sur les sujets abordés.

Il n’est pas obligatoire d’aboutir à un accord. Si les NAO aboutissent, un accord écrit est signé entre les parties. En l’absence d’accord, un procès-verbal (de désaccord) est établi. Il rappelle les propositions de chaque partie et les décisions unilatérales de l’employeur, éventuellement prises.

 

Conclusion

L'année 2025 s’annonce comme un tournant pour les politiques salariales en France. Face à des attentes fortes en matière de pouvoir d’achat, les entreprises devront répondre à la double exigence de conserver leur attractivité et de garantir une répartition équitable des richesses. Dans ce cadre, les élus du personnel auront un rôle crucial à jouer pour assurer que les NAO soient un véritable levier de dialogue social et d’amélioration des conditions de travail pour l’ensemble des salariés.

Didier FORNO

Expert-comptable spécialisé dans les CSE

CEOLIS

Publié le 13/12/2024