Depuis la crise sanitaire, le télétravail s’est imposé dans de nombreuses entreprises, révolutionnant les modes de collaboration. Cependant, certaines entreprises amorcent un retour au bureau obligatoire, remettant en question cette flexibilité. Pour les élus du personnel, il est crucial de bien saisir les enjeux de ce retour afin de défendre les intérêts des salariés. Cet article examine les avantages et inconvénients de ce retour pour les salariés et les employeurs, ainsi que les principaux points de négociation.

 

Une remise en cause du télétravail par certaines entreprises

Certaines entreprises revoient leurs politiques de télétravail pour encourager un retour plus fréquent au bureau. BNP Paribas, par exemple, a progressivement restreint les jours de télétravail en 2023, insistant sur l’importance de la présence physique pour renforcer les relations d’équipe et l’accompagnement des jeunes recrues. Société Générale a suivi une démarche similaire en limitant le télétravail à un maximum de deux jours par semaine pour la plupart des fonctions, afin de retrouver une cohésion d’équipe en présentiel.

Ubisoft, le géant du jeu vidéo, a également opté pour une approche hybride, en incitant ses équipes à revenir au bureau pour favoriser la créativité et les échanges entre développeurs, designers et équipes de production, des interactions qui sont jugées essentielles dans un secteur où l’innovation repose en grande partie sur le travail collaboratif. Enfin, LVMH valorise le travail au bureau, estimant que la culture d’entreprise et l’innovation bénéficient de la présence physique des salariés. Ces initiatives témoignent d’un retour progressif au bureau dans de nombreux secteurs français, avec des approches adaptées aux spécificités de chaque organisation.

 

Avantages et inconvénients du retour au bureau

Avantages pour les salariés

  • Amélioration de la collaboration en présentiel : Être physiquement présent facilite les échanges spontanés et les rencontres informelles, contribuant à une meilleure dynamique d’équipe.
  • Délimitation de la vie professionnelle et personnelle : Travailler au bureau permet à de nombreux salariés de mieux séparer vie privée et vie professionnelle, réduisant le risque de débordement du travail sur la vie personnelle.
  • Accès à un environnement de travail équipé : Le bureau fournit des équipements souvent plus adaptés (écrans ergonomiques, fauteuils, espaces de réunion), ce qui peut améliorer la productivité et le confort par rapport au domicile.

 

Inconvénients pour les salariés

  • Impact sur la qualité de vie : Le retour au bureau implique des déplacements, qui peuvent allonger les journées et augmenter le stress, notamment pour les salariés en zones urbaines congestionnées.
  • Moins de flexibilité et d’autonomie : Le télétravail offre une souplesse dans la gestion du temps que le travail au bureau ne permet pas toujours.
  • Diminution potentielle de la productivité pour certains : Certains salariés se sentent plus efficaces dans un environnement calme et personnalisé à domicile, et le retour au bureau peut engendrer un stress additionnel.

 

Avantages pour les employeurs

  • Renforcement de la culture d’entreprise : Le retour au bureau favorise un esprit d’équipe et une identité collective, difficile à maintenir à distance.
  • Suivi direct de la performance : La présence physique des salariés permet aux managers d’avoir une meilleure perception de l’engagement et de l’implication des équipes.

  • Sécurité de l’information : En limitant le travail à domicile, l’entreprise réduit certains risques de cybersécurité, liés par exemple aux connexions personnelles ou aux environnements de travail non sécurisés.

 

Inconvénients pour les employeurs

  • Risque de démotivation : Les salariés ayant goûté à la flexibilité du télétravail peuvent ressentir une certaine frustration à l’idée de perdre ce mode d’organisation.
  • Augmentation des coûts : Entretenir les locaux pour accueillir tous les salariés entraîne des frais (électricité, maintenance), que le télétravail avait permis de réduire.
  • Attractivité réduite : Dans un contexte où le télétravail est devenu un critère de recrutement, imposer le retour au bureau peut limiter l’attractivité pour certains talents.

 

Grands enjeux de négociation pour les élus du personnel

Le retour au bureau soulève plusieurs questions de négociation pour les élus du personnel, visant à assurer un équilibre entre les intérêts des salariés et les besoins de l’entreprise.

  • Équilibre entre travail présentiel et télétravail : Un retour total au bureau peut ne pas être réaliste ni optimal pour tous. Les élus peuvent négocier un modèle hybride, permettant aux salariés de télétravailler une partie de la semaine.

  • Adaptation des horaires : Pour limiter l’impact des trajets, les élus peuvent suggérer des plages horaires plus flexibles ou des arrivées décalées, permettant ainsi aux salariés d’éviter les heures de pointe.
  • Mesures de compensation : Dans les entreprises où le retour au bureau devient obligatoire, certaines entreprises offrent des compensations telles que la prise en charge des frais de transport ou même des primes de retour au bureau pour compenser l’impact de cette transition.
  • Aménagement des espaces de travail : Un retour réussi passe par un espace de travail adapté aux nouvelles attentes : des zones de collaboration et des espaces de travail flexibles peuvent encourager un retour positif.
  • Santé mentale et bien-être des salariés : Le retour au bureau peut générer un stress supplémentaire, en particulier pour les salariés ayant des contraintes personnelles. Les élus du personnel peuvent négocier un suivi psychologique ou des formations à la gestion du stress pour accompagner cette transition.

 

Conclusion

Le retour au bureau représente un enjeu majeur pour les entreprises et les salariés. Pour certains, il marque un retour à la normalité et une chance de renforcer la cohésion. Pour d’autres, il implique des défis qui doivent être accompagnés de mesures adaptées pour éviter une démotivation. Dans ce contexte, les élus du personnel jouent un rôle clé pour négocier un cadre qui respecte à la fois les besoins de l’entreprise et ceux des salariés, notamment en termes de flexibilité, de bien-être et d’équilibre entre vie professionnelle et personnelle.

Didier FORNO

Expert-comptable spécialisé dans les CSE

CEOLIS

Publié le 28/10/2024