L’économie française traverse une période particulièrement délicate, marquée par des ajustements structurels et conjoncturels dans un contexte mondial incertain. L’augmentation des plans de licenciements, couplée à une croissance économique morose, reflète les défis auxquels les entreprises, les élus du personnel et les salariés sont confrontés.
Un contexte économique fragilisé
Depuis la crise du COVID-19, suivie de la guerre en Ukraine, la France est confrontée à une série de perturbations économiques. En 2024, la croissance du PIB devrait être de 1,1 %, selon les prévisions de l’INSEE, un chiffre en deçà des attentes pour une reprise dynamique. Cette stagnation s’explique par plusieurs facteurs :
- Inflation persistante : Les prix de l’énergie et des matières premières ont continué de peser sur le pouvoir d’achat des ménages et sur les coûts des entreprises, malgré une baisse récente de l’inflation.
- Tensions sur l’emploi : La transformation numérique, la transition écologique et la concurrence internationale poussent les entreprises à revoir leurs modèles économiques, engendrant des vagues de licenciements dans certains secteurs.
- Confiance affaiblie : Les incertitudes sur l’avenir, combinées à un endettement public élevé, réduisent les marges de manœuvre de l’État et la capacité des entreprises à investir.
Une multiplication des plans de licenciements
Depuis quelques mois, de nombreux secteurs annoncent des restructurations :
- Industrie automobile : L’accélération vers les véhicules électriques contraint les sous-traitants traditionnels à adapter leurs chaînes de production. Des milliers d’emplois sont menacés, notamment dans les entreprises dépendantes des moteurs thermiques.
- Distribution et commerce : Face à la montée de l’e-commerce et à une consommation en baisse, de grandes enseignes réduisent leurs effectifs ou ferment des points de vente.
- Technologie : Malgré un secteur dynamique, certains géants revoient leurs effectifs en raison d’une baisse de rentabilité dans un contexte de surinvestissement post-COVID.
Le Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) est devenu un outil central dans ces restructurations. Bien que destiné à accompagner les salariés, il révèle la profondeur des difficultés économiques et sociales du moment. Depuis le début de l’année 2024, près de 250 PSE ont été recensés en France. 150 000 emplois pourraient disparaître dans les prochains mois.
Les perspectives économiques à court, moyen et long terme
À court terme : une reprise hésitante
Les perspectives pour 2025 restent mitigées. La croissance du PIB pourrait se maintenir entre 0,7 % et 1 %, selon les projections. Cependant, l’économie française devra surmonter plusieurs obstacles :
- Maintien de l’inflation : Malgré des signes de ralentissement, les prix alimentaires et immobiliers restent élevés, comprimant le pouvoir d’achat.
- Chômage partiel et licenciements : Les ajustements dans les secteurs industriels et tertiaires pourraient conduire à une hausse du taux de chômage, actuellement à 7,1 %.
- Ressources publiques sous pression : Le gouvernement pourrait avoir du mal à soutenir efficacement l’activité économique, compte tenu de la dette publique qui dépasse 112 % du PIB.
À moyen terme : des transitions à gérer
D’ici 2027, l’économie française devra relever des défis structurels majeurs :
- Transition énergétique : La France s’est engagée dans des objectifs ambitieux de réduction des émissions de carbone, nécessitant des investissements massifs dans les énergies renouvelables et la modernisation des infrastructures. Cela pourrait créer des emplois dans les secteurs verts, mais aussi des tensions dans les industries traditionnelles.
- Transformation numérique : L’automatisation et l’intelligence artificielle promettent des gains de productivité, mais risquent également d’exclure certains emplois peu qualifiés. (Voir notre article sur l’IA anxiété).
- Rééquilibrage des finances publiques : Une réforme fiscale et des efforts de maîtrise des dépenses publiques seront nécessaires pour réduire l’endettement tout en maintenant une politique sociale forte.
Les perspectives de croissance pourraient atteindre 1,5 % par an si ces transitions sont bien gérées, avec une amélioration progressive de l’emploi.
À long terme : un potentiel à réactiver
À l’horizon 2030, l’économie française pourrait renouer avec une croissance plus soutenue, de l’ordre de 1,8 % à 2 % par an, sous certaines conditions :
- Un tissu industriel compétitif : La relocalisation de certaines industries stratégiques et le soutien à l’innovation renforceront la souveraineté économique.
- Une main-d’œuvre qualifiée : Investir dans la formation et l’adaptation des compétences sera crucial pour répondre aux évolutions du marché du travail.
Cependant, le vieillissement démographique et les inégalités sociales resteront des défis majeurs.
Le rôle des élus du personnel
Le CSE est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur les points suivants :
- Mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs,
- Modification de son organisation économique ou juridique,
- Conditions d'emploi, de travail, notamment la durée du travail, et formation professionnelle,
- Introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail,
- Mesures prises en vue de faciliter la mise ou le maintien au travail des malades, des accidentés, des invalides et des travailleurs handicapés, notamment sur l'aménagement des postes de travail.
Dans le contexte difficile actuel, les élus du personnel ont un rôle crucial à jouer. Ils doivent suivre de très près l’évolution économique et financière de leur entreprise. Ils disposent d’outils de prévention (droit d’alerte économique, notamment) et d’outils de défense de l’intérêt des salariés, en cas de plan de licenciements (PSE).
Voir notre article : Crise économique, les outils du CSE pour limiter les licenciements.
Conclusion : agir pour réussir !
La situation économique actuelle de la France est marquée par une croissance fragile et des tensions sur l’emploi, mais elle n’est pas sans opportunités. Les transitions énergétiques et numériques offrent un levier pour transformer en profondeur le modèle économique, à condition d’accompagner entreprises et salariés. Le rôle des partenaires sociaux, notamment des CSE, sera central pour anticiper les mutations, protéger les droits des salariés et encourager le dialogue social.
L’avenir de l’économie française repose sur un équilibre entre adaptation, innovation et solidarité. Pour y parvenir, une vision partagée et des actions concertées seront indispensables. Les élus du personnel, les entreprises et le chef d’entreprise doivent travailler main dans la main pour faire de ces défis une opportunité de transformation durable.
CEOLIS
Didier FORNO
Assistance des élus du personnel
Publié le 24/11/2024