La discrimination directe ou indirecte est prohibée par plusieurs dispositions de la loi. L’article L. 1132-1 du Code du travail, relatif au droit disciplinaire et l’article 225-1 du Code pénal interdisent toute discrimination.

Dans le cadre du droit à la preuve, le juge peut exiger qu’un employeur communique des données non anonymisées de ses salariés, pour établir l’existence d’une discrimination. Les salariés concernés ne peuvent pas opposer un refus à cette demande.

Un salarié invoquant une discrimination bénéficie d’un régime de preuve particulier. En effet, il peut présenter au juge des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination, à charge pour l’employeur de démontrer que les éléments en question sont étrangers à toute discrimination.

Il est souvent difficile pour un salarié d’apporter des preuves de la discrimination. En effet, ces éléments concernent souvent d’autres salariés ou sont des documents en possession de l’employeur.

Pour contourner cette difficulté, le salarié peut demander la communication de documents permettant d’établir la discrimination. Documents dont il n’a pas accès et contenant parfois des informations personnelles.

La Cour de cassation (Cass. Soc. 16 mars 2021) vient de se pencher sur une affaire qui lui permet d’aborder les conditions de communication de données non anonymisées.

Une salariée engagée comme technicienne estime être victime de discrimination en raison de son sexe. En vue de porter l’affaire en justice, elle obtient en référé que l’employeur lui transmette des documents non anonymisés concernant dix salariés de l’entreprise, techniciens d’atelier, comme elle. Elle demande les informations suivantes : position actuelle, coefficient, salaire, coefficient d’embauche, date d’embauche et salaire d’embauche.

L’employeur ne communique pas les documents, cinq des salariés ayant refusés de transmettre leurs données. La Cour d’appel donne raison à l’employeur, estimant qu’au regard du respect de la vie privée, l’employeur avait eu raison de demander l’avis aux salariés.

La Cour de cassation censure ce raisonnement. La Cour d’appel aurait dû : « rechercher au moyen d’un contrôle de proportionnalité si la communication des informations non anonymisées n’était pas nécessaire à l’exercice du droit à la preuve de la discrimination alléguée et proportionnée au but poursuivi ».

Le respect de la vie personnelle du salarié et le secret des affaires ne font pas obstacle à l’application du Code de la procédure civile, dès lors que la demande procède d’un motif légitime et nécessaire au droit à la preuve.

La Cour de cassation considère donc comme justifiée la demande de la salariée, de communication de pièces non anonymisées, afin d’établir une inégalité de traitement, et ce, même si les salariés n’ont pas donné leur consentement.

Rappelons que le comité social et économique (CSE) dispose d’un droit d’alerte en matière d’atteinte aux droits des personnes et aux libertés individuelles. Dans le cadre d’une discrimination présumée, le CSE peut déclencher un droit d’alerte.

Ce droit d’alerte comprend trois phases :

  • Le constat par un membre du CSE, d’une atteinte aux droits des personnes ou des libertés individuelles des salariés,
  • La saisine de l’employeur et une enquête conjointe,
  • La saisine éventuelle des prud’hommes en cas de carence de l’employeur ou si la réponse de l’employeur n’est pas suffisante ou adaptée.

Didier FORNO

Assistance juridique du CSE

CEOLIS

Publié le 30/06/2021